Encourager la planification de fin de vie chez les aînés LGBT : La création d'un répertoire de ressources pour les LGBT en fin de vie en Colombie-Britannique

Gerontology Research Centre, Simon Fraser University, Vancouver BC

ParRobert Beringer (M.A.), Gloria Gutman (Ph.D.) et Brian de Vries (Ph.D.)

Contexte
Par rapport à la population en général, pourquoi faudrait-il que la fin de vie et la planification des soins chez les lesbiennes, gais, bisexuels et transgenres (LGBT) soient envisagées différemment?

Premièrement, le vieillissement et la planification de fin de vie chez les LGBT ont certaines particularités du fait que les aînés LGBT de la cohorte actuelle ont grandi dans une société radicalement différente, où ils étaient souvent ostracisés, rejetés ou méprisés. Par exemple, si l'on définit les aînés comme des personnes de 60 ans et plus, on peut supposer que la plupart de ces adultes du troisième âge sont sortis du placard à une époque où l'homosexualité était à la fois illégale et vue comme une maladie mentale (Orel & Fruhauf, 2015). De plus, beaucoup ont travaillé à une époque où l'on pouvait perdre son emploi à cause de son orientation sexuelle et ont dû par conséquent mener une vie cachée ou une double vie. Beaucoup ont connu la stigmatisation et la discrimination durant leur vie (de Vries, 2015; Meyer, 2003). Statistiquement, les aînés LGBT sont souvent des célibataires vivant seuls (beaucoup se disaient qu'il n'était pas possible de marier une personne du même sexe) et ne disposant pas de réseaux de soutien très étendus. Cette réalité peut exacerber le manque de planification de fin de vie chez les membres de cette communauté (MetLife, 2010). Certes, les choses ont beaucoup progressé pour les aînés LGBT en matière de droits de la personne et d'inclusion, mais il reste encore beaucoup à faire. À l'idée d'aller dans un établissement de soins de longue durée, par exemple, beaucoup s'imaginent qu'ils seraient isolés des autres résidents et victimes de discrimination de la part du personnel et des autres résidents (SAGE, 2011). Cela pourrait amener les aînés LGBT à repousser ou à éviter un traitement à défaut de pouvoir trouver un médecin ou un fournisseur de soins respectueux des LGBT (Met Life, 2010). Nous avons pensé que de tels obstacles et retards pouvaient se répercuter sur la planification de fin de vie chez les aînés LGBT, et notre projet visait à redresser la situation.

Notre projet

Le projet Fostering End-of-Life Conversations, Community and Care among older LGBT adults a été financé par le programme de recherche Catalyseur 2013 du TVN. L'équipe de recherche était composée de professeurs et d'assistants de recherche de six universités canadiennes et d'une université américaine. Plus d'une vingtaine d'organismes de proximité canadiens ont en outre aidé l'équipe à réaliser cette étude. Des ateliers de discussion réunissant des aînés LGBT et des fournisseurs de services ont eu lieu à Vancouver, Edmonton, Toronto, Montréal et Halifax d'août 2014 à mars 2015. Le présent article porte sur les résultats issus des données recueillies à Vancouver. Un total de quatre ateliers de discussion ont eu lieu à cet endroit : hommes gais et bisexuels (n=15); femmes lesbiennes et bisexuelles (n=12); transgenres (n=9); fournisseurs de services (n=7).

Les ateliers ont été enregistrés, puis transcrits et analysés pour que nous puissions en dégager les thèmes. Cette analyse a donné l'élan à la réalisation du site LGBT End-of-Life Conversations et d'un répertoire de ressources pour les LGBT en fin de vie en Colombie-Britannique (British Columbia LGBT End-of-Life Resource Inventory), qui fait l'objet du présent article.

Résultats

Les ateliers ont permis de constater qu'il y avait un besoin et un intérêt pour la réalisation d'un guide de ressources adaptées aux besoins des LGBT. Certaines personnes LGBT de notre groupe se disaient quelque peu mal à l'aise avec les technologies de l'information et de la communication (« J'ai presque balancé [mon ordinateur] par la fenêtre hier; c'est tellement frustrant »). En revanche, plusieurs ont souligné leurs avantages et leur potentiel, notamment pour la recherche d'information et de soutien. Les points soulevés tournaient autour du manque d'information pour les LGBT (« Il fallait se tourner vers des [sites] hétérosexuels; sur les sites allosexuels que j'ai consultés, il n'y avait pas grand-chose. »), du degré d'adaptation aux LGBT (« la plupart des sites sont faits pour les hétérosexuels ») et de la nécessité d'identifier clairement ou d'évaluer les sites adaptés aux LGBT (« ça fait un obstacle de moins »). Ces commentaires et suggestions ont guidé la création d'un répertoire de ressources pour les LGBT en fin de vie en Colombie-Britannique.

Création d'un répertoire de ressources

Des recherches ont été menées en anglais sur Internet d'octobre à décembre 2014 en combinant des termes descriptifs du groupe cible (LGBT, lesbian, gay, bisexual, transgender, older, senior) avec des termes décrivant les domaines d'intérêt (end-of-life planning, advance care planning, financial planning, independent living, senior housing, retirement community, home care, assisted-living, residential care, health care, palliative care et hospice). À ces recherches se sont ajoutées des références de nos partenaires locaux. Nous avons déterminé trois « degrés d'adaptation » (friendliness) aux LGBT :

  1. Un « organisme LGBT » est un organisme créé par ou pour les personnes LGBT.
  2. Un organisme « officiellement adapté aux LGBT » est un organisme qui annonce ouvertement sur son site internet qu'il est adapté aux LGBT en publiant par exemple des énoncés de mission, des codes de conduite ou d'autres énoncés marquant l'inclusion des LGBT. Nous avons jugé que pour être inclus dans cette catégorie, les énoncés devaient mentionner expressément les LGBT; nous n'avons pas retenu les énoncés généraux tels que « nous reconnaissons la diversité ».
  3. Un organisme « officieusement adapté aux LGBT » est un organisme qui annonce ouvertement qu'il est adapté aux LGBT dans un répertoire LGBT, ou qui est désigné « adapté aux LGBT » par un répertoire LGBT, ou qui est un fournisseur de services ayant des liens avec la communauté LGBT. Ces organismes n'annoncent toutefois pas ouvertement qu'ils sont adaptés aux LGBT sur leur site internet.

Nous avons ainsi compilé un répertoire de 54 ressources de planification de fin de vie pour les LGBT de Colombie-Britannique. La principale conclusion de notre démarche : le nombre minime de recoupements entre les paramètres de recherche concernant les LGBT et les termes décrivant la planification de fin de vie. Autrement dit, les sites internet conçus par et pour la communauté LGBT proposaient peu d'information sur la planification de fin de vie. Parallèlement, les sites contenant de l'information pertinente sur la planification de fin de vie ne traitaient à peu près pas de la communauté LGBT. Afin d'offrir une ressource utile à la communauté LGBT, nous avons donc choisi d'inclure au répertoire publié une deuxième section décrivant des ressources générales sur la planification de fin de vie, comme le Portail palliatif canadien.

Accueil

Le répertoire de ressources sur la planification de fin de vie pour les LGBT de Colombie-Britannique a été présenté aux participants d'une assemblée tenue en janvier 2015 (n=93). Nous y avons reçu des commentaires positifs, par exemple que le répertoire est « une ressource précieuse (et) précisément ce dont nous avons besoin » dans la communauté LGBT. Si un tel accueil n'est pas rare, nous avons été surpris de recevoir, moins de 48 heures après l'assemblée, un courriel d'un des organismes listés dans le répertoire, qui voulait passer du statut d'« organisme officieusement adapté aux LGBT » à « officiellement adapté aux LGBT ».

« […] après vous avoir entendu décrire de quelle façon vous déterminiez quels organismes étaient "adaptés aux LGBT" pour le répertoire de ressources, je me suis rendu compte (en tant que représentant de l'organisme pour lequel je travaille) que j'avais été TRÈS négligent à cet égard. »

Cet organisme a modifié son site internet (en ajoutant les couleurs du drapeau arc-en-ciel) le lendemain de l'assemblée de Vancouver pour que les visiteurs y voient clairement que l'organisme souhaite servir la communauté LGBT.

Les jours suivant l'assemblée de Vancouver, nous avons été ravis de constater un enthousiasme général dans les médias sociaux. Les participants ont publié spontanément sur Facebook que l'assemblée avait été « éclairante et informative », et décrit le répertoire de la Colombie-Britannique comme une ressource « remarquable ». Nous souhaitons que ce répertoire soit un « document évolutif » et nous nous sommes engagés à y faire des mises à jour trimestrielles. Nos échanges soutenus avec la communauté LGBT et les suggestions reçues nous ont permis de faire passer le nombre de ressources recensées de 54 à 65 dans les huit mois qui ont suivi le lancement du répertoire à l'assemblée de Vancouver. Ce répertoire a aussi stimulé la création de répertoires de ressources aux quatre autres sites, où les ateliers de discussion ont produit des commentaires semblables à ceux exprimés à Vancouver quant au besoin d'information sur les ressources sûres et accueillantes pour la clientèle LGBT en fin de vie.

Conclusions

L'analyse des ateliers de discussion a confirmé que le manque de ressources adaptées aux besoins des LGBT pouvait nuire à la planification de fin de vie et la retarder. Bien que de nombreux organismes officiels emploient le générique « ouvert sur la diversité », cette étiquette n'a pas très bien servi la population LGBT, la présomption d'hétérosexualité demeurant souvent la norme. En répertoriant les ressources de la Colombie-Britannique et, plus tard, celles d'Edmonton, de Toronto, de Montréal et de la Nouvelle-Écosse, nous avons découvert que peu d'organismes offrant des ressources de planification de fin de vie et leurs sites internet mentionnaient qu'ils incluaient les LGBT ou s'y étaient adapté. L'accueil positif réservé à nos répertoires de ressources montre bien le besoin de ressources adaptées et destinées particulièrement aux LGBT, surtout pour la cohorte la plus âgée des aînés LGBT, qui ont vécu dans un milieu hostile à l'homosexualité. Le répertoire de ressources se trouve sur notre site internet au : www.sfu.ca/lgbteol.html.



Références

de Vries, B. (2015). Stigma and LGBT aging: Negative and positive marginality. In N.A. Orel & C.A. Fruhauf (Eds.), The Lives of LGBT Older Adults (pp.55-72). Washington, DC: American Psychological Association.
MetLife Mature Market Institute. (2010). Still out, still aging. Westport, CT: MetLife Mature Market Institute.

Meyer, I.H. (2003). Prejudice, social stress, and mental health in lesbian, gay, and bisexual populations: Conceptual issues and research evidence. Psychological Bulletin, 129(5), 674-697: 10,1037/0033-2909.129.5.674

Orel, N.A., & Fruhauf, C.A. (2015). The intersection of culture, family, and individual aspects: A guiding model for LGBT older adults. In N.A. Orel & C.A. Fruhauf (Eds.), The Lives of LGBT Older Adults (p.3-24). Washington, DC: American Psychological Association.

SAGE (2011). LGBT older adults in long-term care facilities: Stories from the field. http://www.lgbtagingcenter.org/resources/resource.cfm?r=54

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